Friday, April 19, 2024
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Le Grenier

5 PCs qui ont marqué le monde du jeu vidéo

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Je suis parti dans le grenier vous dégoter ce qui selon moi, pourrait être un bon top cinq des PC qui ont marqué l’histoire des jeux vidéos !

C’est Darty mon kiki !

1. Amstrad CPC 464

Au milieu des années 80, le constructeur britannique Amstrad surprend tout le monde en sortant un micro-ordinateur très bon marché qui fera date dans l’histoire de l’informatique grand public : l’Amstrad CPC 464.

Nous sommes en 1984, l’entreprise Amstrad est alors une société spécialisée dans le matériel hifi qui assemble différents composants à moindre frais : tuner radio, lecteur cassette, amplificateur, etc. Son fondateur, Alan Michael Sugar, dont les premières lettres du patronyme forment l’appelation Amstrad (le reste signifiant Trading ou négoce en français), analyse le marché et comprend qu’il reste une place disponible pour intégrer ce secteur. En effet, d’un côté se trouve des machines très performantes mais peu accessibles au commun des mortels à cause de leurs prix prohibitifs (Apple II, CBM PET 2001, IBM PC) ; de l’autre, des machines plus abordables mais souvent livrées en kit auquel il faut débourser beaucoup d’argent et de temps pour en retirer tous les avantages (Altair 8800, Texas Instrument TI99/4, Commodore VIC-20, Sinclair ZX80, etc.).

Selon le principe de vente déjà éprouvé sur son matériel hifi, Alan Sugar demande à ses ingénieurs de travailler sur un modèle qui devra être vendu à un prix très agressif et dont la prise en main sera la plus simple possible. Le résultat est l’Amstrad CPC 464, un ordinateur 8 bits architecturé autour d’un processeur Zilog 80 vieillissant mais que tous les programmeurs connaissent. Cela aura son importance dans le développement d’applications futures.

L’ordinateur est livré au choix avec un écran monochrome (en réalité vert et blanc) ou en couleur au-dessous de la barre symbolique de 4000 francs (soit 600 euros). Il propose 64 Ko de mémoire vive, un lecteur cassettes directement intégré au clavier mécanique de très bonne qualité et surtout un seul cable de raccordement faisant de cet appareil le premier ordinateur ‘Plug & Play’ qui ne s’encombre pas de toute une série de câbles. Il est également livré avec un langage de programmation en Basic qui fonctionne très bien et qui n’est pas développé par Microsoft, mais par Locomotive Software. Au titre des nouveautés, une sortie stéréo, rare à l’époque, qu’il est néanmoins préférable de brancher sur des enceintes plutôt que d’écouter l’unique haut-parleur intégré de mauvaise qualité. De par son architecture simple, le CPC voit rapidement l’ensemble des jeux vidéo d’arcade adaptés sur son support mais aussi toute une tripoté d’éditeurs dont certains français (Loriciel, Infogrames, Titus, Ere Infomatique) y développer quelques exclusivités. Malgré la concurrence terrible que se livre les constructeurs à cette époque, notamment Commodore avec son fameux C64, l’Amstrad déchaîne les passions, en particulier en Europe, où il détrône les premières places face aux Thomson TO7,

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Sinclair ZX Spectrum et Oric Atmos bien installés sur ces territoires. Il faut dire qu’à ce prix agressif identique à celui de la concurrence mais livré avec un moniteur couleur supplémentaire, le CPC 464 dispose de nombreux avantages et permet de s’initier aux joies de la programmation et du jeux vidéo à moindre frais. De plus, avec son moniteur, cela évite de devoir brancher l’appareil sur l’unique écran de télévision familial. Les premières ventes sont enthousiasmantes, plus de 500 000 CPC 464 s’écoulent en tout juste un an. Une filiale française est créée, les publicités avec les deux crocodiles de la marque affirmant qu’Amstrad a du mordant font leur apparition sur les chaînes françaises (voir vidéo ci-dessus). Même s’il ne propose pas la machine la plus puissante du marché, tout semble réussir à ce nouveau venu qui a su démocratiser l’informatique grand public grâce à un positionnement intelligent.

Si l’on n’occulte le CPC 664 apparu la même année et qui se vendra surtout en Angleterre ; le reste de l’Europe voit apparaître en 1985 une version améliorée du 464 : le CPC 6128. Celui-ci, toujours architecturé autour du Zilog 80, gomme toutes les imperfections de la première version de l’appareil. Il propose 128 Ko de mémoire vive pour un gain de rapidité appréciable, un lecteur de disquette 3 pouces de 180 Ko qui permet d’accélérer considérablement le chargement des applications. Il faut préciser qu’à l’époque, il n’est pas rare d’attendre quinze minutes pour charger un jeu sur cassettes au lieu de quelques dizaines de secondes sur disquette ! En 1987, les nombreuses adaptations de jeux vidéo et centaines d’applications font toujours la joie des possesseurs de CPC même si elles sont le plus souvent de moindre qualité que sur les machines concurrentes. De nombreux magazines spécialisés vantent les mérites de l’appareil et listent des pages entières de code en Basic qu’il faut compiler pour faire apparaître un dessin sur son écran.

Ce n’est pas toujours très beau ou réussi ; en revanche, cela reste extrêmement glorifiant pour tous ceux qui ont réussi à surmonter l’écriture de ces programmes sans aucune erreur de syntaxe. Des vocations apparaissent et de nombreux game-designer, travaillant aujourd’hui dans les jeux vidéo, ont commencé de cette manière. La même année, Amstrad sort les versions PLUS de ces ordinateurs 464 et 6128, une nouvelles fois autour du Zilog 80, alors que les Atari ST et Amiga beaucoup plus perfectionnés sont déjà disponibles à la vente. Le constructeur anglais commence à tourner autour de son architecture qui dépassée techniquement. En 1990, tandis que la guerre est déjà perdue sur le marché de la micro-informatique,

Amstrad décide d’intégrer les jeux vidéo en proposant une console de jeux, la GX 4000, qui reprend les spécificités du 464. Cette fois, la pillule ne passe pas auprès du public et face à des concurrents comme Nintendo, Sega ou Nec qui développent des merveilles de technologie comme la Super Nintendo, la Megadrive ou la PC-Engine, le consommateur ne se laisse pas avoir. Quelques semaines après son lancement, la GX-4000 ainsi que les différentes séries d’ordinateurs CPC ne se vendent plus. Amstrad n’a pas réussi son virage technologique vers les processeurs 16 bits et doit complètement arrêter sa production dès 1992.

Au total, le constructeur britannique aura néanmoins vendu près de 3 millions de CPC dans le monde dont un million uniquement sur le territoire français. Contrairement à d’autres sociétés qui n’ont pas survécu à la concurrence des PC et des Macintosh au début des années 90 (Atari et Commodore par exemple), Amstrad n’a pas déposé le bilan. Le groupe continue d’exister en recentrant son activité original sur la vente de produits hifi et vidéo en plus de décodeurs satellites. Une bien belle histoire qui aura émerveillé des millions de joueurs et suscité des vocations parmi ces derniers il y a plus de 25 ans avec des jeux comme Barbarian, Gauntlet ou Arkanoid par exemple.

2. Apple Macintosh

Le Macintosh est une gamme d’ordinateurs personnels conçus et commercialisés par la société Apple, apparus pour la première fois en janvier 1984 avec le Macintosh 128 K.

Il ne s’agit pas du premier ordinateur personnel du constructeur à la pomme puisque l’Apple II (1977) et l’Apple Lisa (1983) le précèdent de quelques années. En revanche, on peut dire qu’il s’agit de l’un des premiers ordinateurs grand public haut de gamme de par son architecture et “accessible” puisqu’il est vendu au tiers du prix du Lisa avec une suite logicielle, une souris et une interface graphique au lieu d’un interpréteur de commandes de type DOS. En fait, dès son origine, le Macintosh a toujours été imaginé dans l’idée de faciliter au maximum les tâches utilisateurs pour que n’importe qui puisse le faire fonctionner sans avoir de connaissances particulières en informatique (Fortran, Basic, Assembleur, etc.). Le concept général du Macintosh est attribué à Jef Raskin, un salarié d’Apple qui travaillait sur le projet Lisa de Steve Jobs, mais qui réussit à convaincre sa direction dès 1978 de monter un pôle d’ingénieurs dédiés à la conception d’un ordinateur coûtant moins de 1000 $ où tout serait intégré dans sa version de base : matériels, mémoire vive, logiciels, imprimante, etc. L’objectif avoué étant de concevoir une machine propriétaire et non évolutive comme le proposait IBM avec sa gamme de PC. Raskin travaille sur le Macintosh jusqu’en 1980 avant d’être finalement rejoint par Steve Jobs qui s’est fait évincer du projet Lisa à cause de son mauvais caractère. Les deux hommes se partagent les branches matérielles et logicielles de sa conception mais ne s’entendent pas poussant ainsi Raskin à démissionner en 1982. Celui-ci laisse carte blanche à son homologue qui impose alors à ses équipes de nouvelles directives : souris en standard, interface utilisateur reprise du Lisa et aucun ventilateur à l’intérieur du boitier pour en faire un objet silencieux (qui plantera souvent malgré tout).

Seul l’appellation Macintosh, du nom de la variété de pomme préférée de Raskin, perdure. Le nouvel ordinateur d’Apple est annoncé en grande pompe par une campagne d’envergure fin 1983 avec une publicité de 20 pages dans différents magazines spécialisés ! Le spot-tv est diffusé pour la première fois à la télévision deux jours avant la sortie de la machine lors du Superbowl du 22 janvier 1984. D’une durée d’une minute, réalisé par Ridley Scott pour un budget estimé à 1,5 million de dollars à l’époque, celui-ci fait l’effet d’une bombe médiatique en reprenant l’univers du best-seller “1984” de George Orwell. Bien sûr, IBM et ses PC compatibles y jouent le rôle du méchant Big-Brother tandis qu’Apple et son Macintosh incarnent la révolution du peuple. (voir vidéo ci-dessus)

Si le Macintosh représente effectivement une révolution en terme de positionnement et de vision futuriste à l’époque, il n’est pour autant pas dénué de défauts. Architecturé autour d’un excellent processeur, le Motorola 68000 cadencé à 8 MHz plus puissant que celui du Lisa, le Macintosh dispose en revanche d’une mémoire vive rachitique de 128 Ko que l’on ne peut pas augmenter et d’un lecteur disquette simple face de 400 Ko auquel on ne peut pas adjoindre de disque dur. Résultats : un ordinateur extrêmement lent pour fairer tourner le système d’exploitation et la suite logicielle qui inclut Mac Paint (ancêtre de Photoshop), Mac Write (logiciel de traitement de texte) et Mac Draw (ancêtre d’Illustrator). Le clavier mécanique, même s’il est de bonne conception, ne propose pas assez de touches et n’a aucun volet numérique dans sa version standard. L’écran de 9 pouces, obligatoire puisqu’il intègre tous les composants, est monochrome. Bref, si les ventes sont appréciables lors des premiers mois d’exploitation, elles ne sont en rien comparables à ce que l’on peut voir chez la concurrence : Commodore 64 en tête, Amstrad CPC, Atari 520 ST et Amiga qui proposent quant à eux des jeux vidéo en couleurs de grande qualité et la possibilité de s’initier à la programmation informatique. Tous ces petits défauts seront corrigés par la suite avec les moutures successives : l’apparition du 512 Ko quelques mois seulement après la sortie du Macintosh mais surtout des gammes Macintosh Plus, SE et Classic qui ajouteront à chaque fois de la mémoire vive ainsi qu’un disque dur externe et un écran en couleur. Les ventes du Macintosh connaîtront même un regain d’intérêt à la sortie de Multiplan de Microsoft (ancêtre d’Excel) et surtout du logiciel Pagemaker et d’une imprimante laser en 1986 qui combleront le secteur de l’édition et de la programmation assisté par ordinateur (PAO) qui fait son apparition.

De plus, le Macintosh est l’un des premiers ordinateurs à se passer de lignes de commandes complexes pour proposer une interface graphique munies d’icônes (programmes, corbeilles, outils, etc.) reprises par un certain Bill Gates pour son MS-Dos quelques années plus tard (prochain Windows 3.0). Souvent considéré comme le diable par les adorateurs d’Apple, ce dernier apparait pourtant bel et bien dans les publicités d’époque en affirmant que le Macintosh est un ordinateur formidable… Notons enfin qu’à l’intérieur du boitier des premiers Macintosh se trouvent l’ensemble des signatures moulées de l’équipe ayant participé à la conception de la machine dont celles de Steve Jobs, de Jef Raskin et de Steve Wozniak.

3. Thomson T07

Sorti en 1982, le TO7 est le tout premier ordinateur grand public français qui a connu ses heures de gloire au milieu des années 80 avec le “Plan Informatique pour Tous” (PIT) que l’on doit au premier ministre de l’époque, Laurent Fabius.

Architecturé autour d’un excellent Motorola 6809 cadencé à 1 MHz, le Thomson TO7 souffre malgré tout d’une mémoire insuffisante de 6 Ko qui le ralentit, d’un clavier numérique à gomme peu ergonomique et d’une alimentation externe qui a tendance à surchauffer après quelques heures d’utilisation mais surtout d’un prix prohibitif de 7000 francs (soit 1050 euros) qui ne le laisse pas à la portée de toutes les bourses. Malgré une baisse de prix significative dès 1983 (3450 francs), il faut néanmoins ajouter plusieurs centaines d’euros pour l’achat de périphériques externes (lecteurs de cassettes/disquettes, ajout de mémoire externe, joystick, etc.) et utiliser le plus souvent l’unique écran familial qu’on raccorde à l’aide d’une péritel pour faire fonctionner la machine.

De plus, la concurrence des Amstrad CPC 464, Commodore C64 et dans une moindre mesure les ZX Spectrum font rage à cette époque et le TO7 n’est en rien compatible avec les standards naissants : MSX, IBM PC. Néanmoins, l’ordinateur de Thomson est livré avec un crayon optique intégré qui permet de dessiner sur écran et se voit rapidement offert avec un programme Basic sur cartouche que l’on doit à Microsoft, obligatoire pour faire tourner les jeux et programmes de l’époque. Une partie de ces défauts seront corrigés l’année suivante avec la sortie de son successeur, le TO7/70, qui propose un clavier mécanique de meilleure facture ainsi que de nouveaux graphismes en 16 couleurs.

Dès 1984, Thomson est donc fin prêt à convaincre l’éducation nationale afin d’intégrer nombre de ses ordinateurs (série TO mais aussi MO avec le MO5) aux écoles françaises pour former les jeunes étudiants aux joies de l’informatique. Le TO7 est donc un ordinateur français d’assez bonne facture dont on verra d’ailleurs des versions successives à partir de 1986 (TO8, TO9, TO9+) améliorant tous les défauts de conception d’origine mais qui ne pourront absolument pas faire face aux Atari 520/1040 ST et Amiga 600/1200 qui trustent rapidement les podiums grâce à leur meilleure conception. À noter également que les micro-ordinateurs de la série TO sont compatibles avec les Minitels de l’époque et que TO signifie assez logiquement : Télé-Ordinateur.

4. ZX Spectrum

Lancé en avril 1982 au Royaume-Uni, le ZX Spectrum est le troisième ordinateur grand public de la société Sinclair. Toutes versions confondues, il s’agit de l’ordinateur le plus vendu en Angleterre [1], le premier marché européen de la micro-informatique à cette époque.

En 1980, l’entreprise Sinclair Research, du nom de son fondateur Clive Sinclair, connaît une croissance exponentielle suite au lancement de son ordinateur ZX-80 et de son successeur, le ZX-81, l’année suivante. En effet, ces machines très bon marché, vendues à moins de 150 €, ont permis à un très grand nombre de particuliers de s’initier aux joies de l’informatique ce qui était alors impossible sur les plateformes concurrentes inabordables pour le grand public (Apple II, Texas TI99/4, Tandy TRS-80, Atari 800). À partir de 1981, un changement s’opère et le privilège réservé jusqu’ici à une élite et aux entreprises devient le lot commun de tous. Il n’est désormais plus rare de voir un micro-ordinateur trôner fièrement au sein du salon familial aux côtés de l’unique écran cathodique de la maison. La demande du public est forte et de nombreux constructeurs appliquent à la clé la stratégie initiée par Sinclair en proposant des ordinateurs à prix cassés.

C’est le cas notamment de Commodore qui lance son Vic-20 en 1981 en suivant les préceptes établis par son PDG, Jack Tramiel, selon lesquels “le business, c’est la guerre” (“Business is War”). Toutefois, les compétences indéniables de Clive Sinclair en la matière font que peu d’entreprises réussissent à atteindre les limites fixées par le constructeur anglais, dont les machines s’affichent à des prix records de 70 € à l’époque. En 1982, le premier groupe de médias britannique, la BBC, organise un appel d’offres pour demander aux meilleurs constructeurs anglais de concevoir un ordinateur. La machine retenue sera présentée dans une émission hebdomadaire dont l’objectif est de sensibiliser l’opinion publique aux bienfaits de l’informatique, appelée The Computer Programme. En tant que précurseur, Sinclair Research se place sans surprise parmi les entreprises favorites mais se voit subtiliser le contrat au dernier moment par son concurrent Acorn qui propose une plateforme plus aboutie sur tous les points, l’Acorn BBC. Clive Sinclair est furieux ! Il se considère à juste titre comme la personne qui a permis la démocratisation de l’informatique personnelle dans son pays et n’a pas l’intention de se laisser faire [2]. Sa réponse est cinglante et porte le nom de ZX-Spectrum.

Connu sous différentes appellations alors qu’il n’était qu’au stade de projet, ZX-81 Color puis ZX-82, le ZX-Spectrum sort en avril 1982 en Angleterre. Il est lancé quelques mois plus tard en France où il est très bien reçu contrairement à l’Allemagne qui lui réserve un accueil mitigé, lui préférant des machines plus performantes. Pourtant, le nouvel ordinateur de Sinclair marque une véritable évolution par rapport à la gamme ZX-80 amorcée deux ans plus tôt. Architecturé autour du même processeur, l’appareil propose cette fois-ci des graphismes en couleurs, un clavier en gomme de meilleure qualité [3] et plus de mémoire vive, 16 Ko ou 48 Ko pour un prix avoisinant les 150 €. L’appareil est livré avec un manuel d’utilisation en Basic qui explique en détail les instructions visibles sur les touches du clavier (GOTO, LOAD, LIST, etc.). En revanche, le ZX Spectrum ne propose aucun moniteur et il faut acquérir des accessoires supplémentaires, appelés Interface 1 et Interface 2, pour pouvoir sauvegarder ses données ou jouer. L’enregistrement se fait à l’aide d’un lecteur de cassettes classique ou sur un lecteur de Microdrive [4] qui sera abandonné quelques mois plus tard faute de succès. Tout comme ses prédécesseurs, il ne s’agit donc pas d’un ordinateur complet et le prix final revient toujours plus cher que celui indiqué sur les publicités qui abondent dans les magazines spécialisés. À ce propos, de nombreuses revues apparaissent pour satisfaire une large communauté de passionnés qui apprennent à programmer. On en décompte plus de 80 dans le monde entier.

Au sommet de sa gloire, Sinclair produit jusqu’à 15 000 exemplaires par semaine et traverse l’Atlantique pour être distribué aux Etats-Unis par Timex, sous un nom différent TS 2068. En ce qui concerne l’Europe, le succès du Spectrum est comparable à celui de son principal concurrent, le Commodore 64, qui s’écoule à des millions d’exemplaires aux Etats-Unis et dans le reste du monde. Toutefois, le Spectrum reste l’ordinateur le plus vendu au Royaume-Uni. Ce succès mérité, ainsi que les précédents, valent à son créateur d’être anobli par la Reine d’Angleterre en 1983 pour l’ensemble du travail réalisé et l’image positive “so british” que suscite la vente de ces produits à l’étranger. En 1984, Lord Clive Sinclair lance donc une nouvelle version du Spectrum, appelée Spectrum +, qui se différencie principalement de l’original par son clavier allongé censé simplifier la dactylographie. Dans la réalité, on n’est encore loin des ténors du genre mais il y a une sensible amélioration. L’année suivante sort le Spectrum 128 d’abord en Espagne puis sur les autres territoires européens. Il est disponible avec une puce sonore intégrée pour un rendu plus performant, une sortie vidéo RGB et surtout 128 Ko de mémoire vive pour pouvoir écrire des programmes plus complets.

Malheureusement, en ce début d’année 1985, la société Sinclair ne se porte pas au mieux. Son inventeur de génie, à force de vouloir se diversifier en développant des écrans plats cathodiques (la TV Flat 80) mais également une voiture électrique, la C5, qui a coûté extrêmement cher en recherche et développement, voit ses intérêts passer dans le rouge. La sortie du Sinclair QL en 1984, un ordinateur 32 bits réservé au marché professionnel, est aussi un flop magistral. Sur ce secteur, Sinclair ne peut absolument pas faire face à la concurrence imposée par Apple et IBM avec leur Macintosh et leur IBM PC qui jouissent d’une meilleure image auprès des entreprises. Sur le marché grand public, les ventes sont également en perte de vitesse à cause des sorties des Amstrad CPC, Atari ST et Amiga 1000 qui remplissent les caddies des adolescents et des parents. En 1986, Sinclair accuse le coup. L’entreprise perd des millions d’euros et est rachetée la même année par son concurrent Amstrad qui obtient les droits d’exploitation de la marque et des différentes gammes d’ordinateurs. Elle continue de développer le Spectrum en plusieurs versions ‘+2’ et ‘+3’ avec un lecteur de cassette puis avec un lecteur de disquette intégré qui se différencient très peu de la gamme CPC. Du point de vue de sa ludothèque, les joueurs ont pu apprécier le développement de centaines de jeux réalisés par des éditeurs tiers chaque année. Il y a du bon et du moins bon mais dans l’ensemble cela reste très positif avec des titres comme Elite, Chequered Flag, Flight Simulator, Arkanoid, Renegade, Double Dragon, etc. La particularité du développement sur Spectrum provient du fait que contrairement aux autres ordinateurs, il n’existe pas de routines disponibles en ROM permettant une programmation simple de la machine. En résulte d’innombrables conversions d’arcade et de grands hits le plus souvent bâclées ou de moindre qualités que sur les machines concurrentes.

En revanche, l’avantage de développer un jeu à partir de rien permet l’émergence de titres exclusifs très originaux dans leur approche graphique : en fausse 3D, en vectoriel, en 3D isométriques, etc. Ceux qui réussissent à contourner les contraintes techniques de cet appareil sont depuis devenus de grands noms de l’industrie du jeu vidéo : c’est le cas de Peter Molyneux (Populous, Fable), David Perry (Aladdin, Earthworm Jim) ou le studio de développement Rareware qui édite ses premiers jeux sur Spectrum : Jet Pac et Pssst. Le ZX-Spectrum sera exploité par Amstrad jusqu’en 1992, date à laquelle il n’est plus possible de faire face à la concurrence des consoles 16 bits de Nintendo et de Sega et encore moins des ordinateurs plus puissants. Mais ces derniers ont également fort à faire face au PC qui devient peu à peu le standard universel, la machine “ultime” souhaitée par de nombreux professionnels et joueurs lassés de tous ces appareils incompatibles entre eux. Entre Acorn, Oric, Amstrad et Sinclair, le Royaume-Uni aura en tout cas montré un très grand savoir-faire pendant plus d’une décénnie sur le marché de la micro-informatique grand public.

5. Atari 800

Pionnier des jeux vidéo en 1971 avec sa borne d’arcade Computer Space, le constructeur Atari décide de se lancer sur le marché de la micro-informatique à la fin des années 70 avec son premier ordinateur grand public : l’Atari 800.

Déjà bien installé sur le marché naissant des jeux vidéo qu’il a contribué à créer avec le jeu vidéo Pong en 1972 et la console VCS 2600 en 1977, Atari décide de s’immiscer sur les plates bandes d’Apple et de Commodore en concevant un ordinateur grand public, concurrent de l’Apple II et du CBM/PET. L’équipe en charge du développement se met rapidement au travail. Elle est dirigée par Jay Miner, à qui l’on doit également la série des Amiga chez Commodore à partir de 1985. Suivant les directives de la Warner qui détient Atari depuis 1976, la nouvelle machine doit être en tout point supérieure à ce que propose la console de jeux VCS 2600 tout en ajoutant les caractéristiques d’un micro-ordinateur (clavier numérique, langage de programmation, périphériques de série, logiciels éducatifs, jeux, etc).

Pour ce faire, Jay Miner décide de garder le micro-processeur central de la VCS 2600, le fameux MOS 6502, mais intègre trois processeurs supplémentaires spécialisés dans l’audio et le graphisme afin d’alléger sa charge. Encore tenu secret, le nom de code du projet est Colleen & Candy, prénoms de deux jolies secrétaires de l’entreprise à qui les développeurs ont certainement voulu adresser un message subliminal. Deux noms de code qui correspondent également à deux gammes d’ordinateurs: l’Atari 400, qui dispose de 4 Ko de mémoire vive et l’Atari 800 plus puissant qui en aura huit. Les machines sont dévoilées pour la première fois en 1978, la même année où Nolan Bushnell, le fondateur d’Atari, tire sa révérence se heurtant de plus en plus à la vision des cadres de la Warner et ne croyant pas à la rentabilité de ce projet.

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L’Atari 400 et l’Atari 800 sont lancés en 1979. Le prix de la mémoire ayant chuté de manière drastique au cours des mois précédant le lancement, chacun des modèles verra ses caractéristiques initiales améliorées. En ce qui concerne les différences principales, elles se situent surtout au niveau du clavier (gomme pour le 400 et mécanique pour le 800) et les ports cartouches : simple pour l’entrée de gamme qui ressemble de plus en plus à une console de jeux “survitaminée” et double pour le haut de gamme permettant de jouer et de s’immiscer en parallèle aux joies de la programmation en BASIC. Le design des deux appareils ressemble à s’y méprendre à une machine à écrire dans le but de s’intégrer au matériel bureautique de la maison et chacune des machines dispose de 4 ports cartouches compatibles avec les manettes de la VCS 2600 dont les ventes continuent d’augmenter.

Au départ, l’Atari 400 et l’Atari 800 se vendront également très bien en proposant de nombreuses conversions de jeux d’arcade qui sont nettement plus abouties que sur VCS. Néanmoins, elles ne pourront faire face au raz-de-marée imposé par Commodore et son C64 à partir de 1982. Atari tentera bien de répondre avec une nouvelle série d’ordinateurs 8 bits gommant les imperfections aperçues ici et là mais son positionnement d’éditeur de jeux ne convainc pas un public très averti et pour qui les marques IBM et Apple jouissent d’une plus grande crédibilité à leurs yeux.

Entre 1982 et 1983, la série d’Atari XL (1200, 600 et 800) sera balayée par la crise subie par Atari et toute l’industrie du jeu vidéo à la même période. Croûlant sous d’énormes dettes qui se chiffrent en plusieurs centaines de millions de dollars, Warner laisse la filiale informatique à Jack Tramiel en 1984, ancien fondateur de Commodore. Le jeu des chaises tournantes peut débuter et la guerre des 16 bits (Atari 520 ST face à Amiga) s’enraciner. Quant à la division 8 bits, elle ne résoudra jamais son problème de positionnement bancal entre micro-informatique et jeux vidéo et doit fermer définitivement ses portes le 1er janvier 1992 non sans avoir tenté d’imposer une nouvelle gamme XE qui n’apporte rien de nouveau et une console de jeu ATARI XE GS en 1987 qui ne pourra s’imposer face à Nintendo et Sega, déjà bien implantés dans le secteur. La fin imminente d’un géant apparaît aux yeux de tous, les fans incrédules n’ont que leurs yeux pour pleurer…